Voilà un moment que je n’ai pas publié de lignes ouvertement érotiques mais une tragédie personnelle me pousse à m’y remettre : je n’ai rien de mieux à faire. Pour celles-ci, je tiens à préciser que si certain(e)s d’entre vous cherchent à faire un parallèle avec mon histoire personnelle, je vous le dis tout de suite, vous faites fausse route. Bien que basé sur des faits (et extrapolations) réel(le)s, ce qui suit n’est que fiction. Je nierai énergiquement quelque assimilation que ce soit.
Prologue :
Quel élève n’a pas un jour fantasmé de pénétrer l’antre interdit de la salle des profs ? Quand on passe devant, on entend toujours des conversations animées, des rires gras, des engueulades parfois… On guette les voix des professeurs aimés, on redoute les inflexions des tortionnaires, on cherche à reconstituer des bribes de discussions, on espère des détails personnels pour ressentir ce plaisir ultime de détenir des secrets à divulguer au plus vite pour se faire valoir auprès de nos camarades…
Mais un jour, le mythe s’effondre, la barrière est franchie et la salle taboue devient la salle refuge. Un jour, on a un casier à son nom. Un jour, on refoule gentiment les jeunes les plus courageux qui tentent quand même de se faufiler en ce lieu sacré, prétextant un papier urgent à transmettre à untel ou unetelle. Un jour, on envahit le saint des saints en conquérant (ou en blasé), on fait cracher la machine à café, on déverse ses copies sur les tables, on consulte en souriant ou en pestant les listes des classes, on cherche désespérément le classeur contenant les emplois du temps, on râle contre celui qui a fini la dernière ramette de papier à la photocopieuse sans prendre la peine de ravitailler… Bref, un jour, on devient prof : personne n’est à l’abri de ce genre de destin.
Au début, la sensation est perturbante. On se dit à chaque instant que quelqu’un va se rendre compte de la supercherie et vous expulser à votre tour de la pièce… mais non. On vous salue, on vous demande d’où vous venez, ce que vous enseignez, on vous demande quelles classes vous avez… on vous conseille, on vous met en garde… ou on vous ignore tout simplement. Finalement, la salle des profs n’est qu’un microcosme comme un autre, avec ses codes et ses clans. Vous êtes adulte maintenant, vous devez vous adapter. La salle des profs a ses habitués, et chacun squatte son quartier préféré. Il arrive que les profs se regroupent par matière, mais ça n’a rien de systématique, sauf peut-être pour les profs d’Anglais, c’est une race à part. Et vous débarquez dans ce monde étrange mais pourtant familier.
Chapitre premier : La rencontre
Je suis arrivée dans cet univers un peu par hasard et je commence à peine à m’acclimater à mon premier établissement. L’équipe de Lettres est plutôt sympathique et au bout de quelques semaines, je connais le nom de tous mes collègues… mais il me manque un visage. Une certaine Madame Daumas.
Quand je me renseigne auprès de ma coordinatrice, on me dit « Mais si, tu la connais, c’est Val, la petite brune, assez fine et très réservée… On ne la voit pas beaucoup parce qu’elle est sur deux établissements en même temps, mais elle était là à la pré-rentrée et à la réunion info de la semaine dernière ». Autrement dit, noyée dans la masse des trente inconnus que j’ai découverts ces derniers jours… J’ai beau fouiller ma mémoire, rien ne me vient. Mes traits doivent trahir mon égarement car ma collègue ajoute « T’inquiète, la prochaine fois, je te la montre ».
Je fonde bien malgré moi beaucoup d’espoirs sur cette Val, parce que jusqu’à maintenant, aucune de mes collègues, toutes matières confondues, ne m’a semblé fréquenter de près ou de loin la Communauté. C’est idiot, mais je me sens seule. Je n’ose pas encore m’ouvrir au cercle relativement amical qui s’est formé autour de moi, mais je sais que ça ne saurait tarder. L’ambiance est bonne et à mon habitude, je me suis orientée vers les plus débauchés.
Les jours passent et ne se ressemblent pas. En salle des profs, des guerres éclatent, les boites de chocolats pullulent, on approche des vacances de Noël. Un jour que je fais semblant de corriger quelques copies en écoutant deux collègues déblatérer sur des parents peu courtois, une prof entre deux âges fait son apparition. Elle est relativement petite et fine, ses cheveux bruns sont retenus par une queue de cheval et elle porte un jean clair avec un pull à grosses mailles. Rien dans son allure ni son aspect n’aurait retenu mon attention si je ne l’avais vu se diriger tout droit vers le casier portant le nom de Valérie Daumas.
Comme elle l’ouvre, je soupire et commence à broyer du noir. Non seulement elle a tout de la prof-maman-hétéro, mais en plus elle aborde ce petit air pincé et ce sérieux qui me désespèrent. Elle s’installe non loin de moi et ouvre son manuel sans même un regard autour d’elle, sans un bonjour, sans le moindre signe de civilité.
J’ai beau être d’un naturel réservé, je ne résiste pas à la provocation que ma déception vient d’amorcer.
– Salut, tu dois être Valérie. Je suis nouvelle dans l’équipe.
– Bonjour, répond-elle d’une voix à peine audible, comme si je lui avais extorqué cette politesse à force de torture psychologique.
– J’ai appris que tu bossais sur deux établissements… ça doit être compliqué à gérer…
– J’en ai l’habitude.
Comme visiblement chaque mot lui coûte un organe vital, je décide que j’ai atteint mon maximum de courtoisie et je la laisse à ses lectures. Décidément, ce bahut ne sera pas le théâtre de mes frasques sentimentalo-sexuelles. De mon coin de table, je l’observe.
Elle n’est vraiment pas très épaisse, on dirait qu’on peut la plier juste en lui soufflant dessus. Tout chez elle vibre de fragilité. Je ne serais pas étonnée de la voir sortir un mouchoir de sa manche… Sa peau est presque translucide et un fin duvet lui confère une douceur de nuage. Nulle chaleur n’émane de sa personne, son regard presque éteint passe d’une ligne à l’autre sans que le gris de ses pupilles ne s’emballe. Ses traits, platement harmonieux, sont fades et je note de légers cernes qui aggravent la tristesse de son visage. Elle pourrait avoir une trentaine d’années, ou dix de plus. Difficile de se faire un avis sur la question.
La sonnerie m’arrache à mes observations stériles.
Chapitre deux : Une découverte
L’année se poursuit et il nous arrive de nous recroiser en salle des profs. Chaque rencontre avec elle me met un peu mal à l’aise. On ressent une sorte de peine étrange et profonde en sa présence, quelque chose d’indéfinissable. Sa retenue et sa discrétion semblent cacher quelque chose de foncièrement lourd. Un poids qu’elle ne peut partager avec le commun des mortels.
Pendant un temps, elle me rappelle la description que Monsieur Rochester fait de Jane Eyre, ce petit être féerique, mi-humain mi-elfe qui semble vivre dans une dimension parallèle tant les événements semblent glisser sur elle. Malgré moi, je me mets à imaginer des histoires tragiques : la perte d’un enfant, un veuvage, des parents infirmes ou grabataires dont elle aurait la charge…
Au fur et à mesure des mois, le mystère qui plane autour de Val s’épaissit. Elle ne m’attire pas le moins du monde mais au moins elle stimule mon imagination romanesque ! Pourtant, elle est, comme Jane, l’être le plus insignifiant qu’il m’ait été donné de voir.
A l’approche du brevet, on nous distribue les listes pour la nouvelle épreuve au programme : un oral sur l’Histoire des Arts. Chaque élève doit passer devant un jury constitué de deux professeurs. Parce qu’elle a oublié de s’occuper de la chose, la principale adjointe nous a laissé le choix des équipes. Evidemment, les premiers arrivés sont les premiers servis, et quand je me pointe devant le tableau, il ne reste plus qu’une poignée de noms… principalement des profs d’Anglais… Quand je vois celui de Valérie, je ne résiste pas à la tentation de pouvoir donner libre cours à mon imagination toute une matinée durant.
Le matin de l’épreuve, je la trouve devant la salle, attendant patiemment. Elle répond timidement à mon « bonjour » et attend que j’ouvre la salle. Comme je lui demande si elle sait comment va se passer la matinée, elle me rassure en quelques mots sibyllins à peine murmurés. Comme les premiers jours de l’été sont arrivés, j’ouvre les fenêtres et laisse rentrer un petit air rafraîchissant.
Je l’observe installer nos bureaux face à l’espace vide que viendront bientôt combler un à un les élèves pantelants qui poireautent pour l’instant aux portes de l’établissement. J’ai presque envie d’accourir pour l’aider tant ces pseudo meubles me paraissent excessivement lourds pour sa frêle silhouette.
Quand elle s’assoit, elle déballe scrupuleusement un petit bloc de feuilles et une trousse savamment garnie. Elle en sort deux stylos, un rouge et un noir, qu’elle dispose méthodiquement, l’un à droite, l’autre à gauche de son bloc. La maniaquerie m’a toujours fait sourire, mais cette fois, elle m’attriste.
Je viens prendre place à ses côtés et sors sauvagement quelques feuilles cornées et trois stylos dépareillés qui roulent bruyamment sur la table. Il est tôt encore, et il va falloir mettre un minimum d’ambiance dans cette salle, aussi, j’ose :
– Tu veux un café avant qu’on commence ?
– Bonne idée, me répond-elle sans réel enthousiasme.
Nous ressortons de la salle et nous dirigeons vers le sanctuaire professoral où la machine à café ronronne depuis une heure déjà. Comme nous montons les marches et qu’elle avance juste devant moi, mon regard s’arrête brusquement sur sa cheville droite.
Depuis qu’il fait chaud, elle a remplacé son jean par un trois-quarts moulant, genre marin, et ses bottes se sont effacées au profit de petites sandales aux fines lanières. Là, juste au-dessus de sa malléole, je distingue vaguement un dessin aux contours finement ciselés. Je reconnais la couleur caractéristique de l’encre : elle a un tatouage. ELLE A UN TATOUAGE !
En soi, un tatouage ne veut rien dire, bien sûr… Il n’empêche que je manque de rater une marche tant cela me surprend. C’est complètement en décalage par rapport au personnage que je m’étais figuré. En un quart de seconde, mon imaginaire est bouleversé. Mon cerveau se met en branle et bien vite, je me perds dans des circonvolutions toutes plus farfelues les unes que les autres. Arrivées devant la machine, je me permets de l’inviter, faisant taire ses protestations en répliquant qu’elle me paierait le prochain.
Comme je réfléchis à un moyen d’entamer une conversation quelconque, de nouveaux caféine-addicts font irruption. On me parle, je réponds. Pourtant je suis ailleurs. Je regarde son pied malgré moi. J’espère qu’elle ne me voit pas. J’essaie de rester discrète. Mais je regarde son pied. Je cherche à savoir ce que représente son tatouage : il s’agit d’une forme tribale, très travaillée, très réussie, indéchiffrable.
La salle se remplit vite et autour de nous, le brouhaha devient assourdissant. Quand le Principal entre pour annoncer le début des hostilités, je suis presque soulagée. Comme elle me regarde, je lui fais un petit signe de tête en direction de la porte, et nous sommes les premières à regagner notre salle. Je la laisse avancer devant moi et je l’observe à nouveau.
J’ai la curieuse impression de la voir pour la première fois. Je remarque les contours bien dessinés de ses épaules et la saillance de ses muscles fins. Sa nuque délicate est découverte et ses cheveux sont retenus par une large pince. Sa démarche me semble plus assurée qu’à l’accoutumée, mais peut-être n’est-ce que mon imagination…
Chapitre trois : LA découverte
Les élèves sont entrés dans le collège. Ils attendent sagement sur les chaises qui ont été disposées devant chaque salle. Quand nous passons devant les nôtres, je vois Valérie s’arrêter et engager la conversation. Elle les rassure de sa voix la plus douce. Son regard est empreint de bonté et de compassion. Je suis émue de lire la reconnaissance dans les yeux des élèves.
Pour ne pas perdre contenance, je tente à mon habitude de détendre l’atmosphère en plaisantant. Elle sourit pour la première fois depuis que je la connais. Et même si je sais que son sourire était avant tout destiné à rassurer nos jeunes, je suis touchée. C’est complètement idiot.
Notre première victime nous suit à l’intérieur et nous lui laissons quelques minutes pour préparer son sujet. J’en profite pour lui demander quelles œuvres elle a fait étudier à ses élèves. Elle me retourne la politesse. Je la sens se détendre un peu au fil de la conversation qui s’amorce enfin mais il faut maintenant commencer.
Le jeune homme devant nous bafouille une vague introduction et se lance dans son analyse du « Cri » de Munch. Le tout est assez hésitant et confus. Valérie prend des notes, consciencieuse. J’essaie d’en faire autant. Je fais mon possible pour focaliser mon attention sur notre fébrile candidat. Dès lors qu’il estime avoir fait le tour de la question, nous l’interrogeons à tour de rôle.
Je suis à chaque fois étonnée de la douceur de sa voix. Pendant une fraction de seconde, j’aimerais être à la place de l’élève et me laisser guider par cette voix… Mais je reviens sur Terre. Je suis prof, nom de Dieu ! Un peu de tenue et de rigueur !
Pendant les deux heures suivantes, les élèves défilent. Les exposés déclenchent nos sourires ou des crispations de nos mâchoires. Au fur et à mesure, je sens une complicité – professionnelle ! – se créer entre nous. Je devine les questions qu’elle va poser, elle me laisse pinailler au gré de mes manies. Et elle sourit de plus en plus. Son visage est transfiguré quand elle sourit. Je ne la reconnais pas.
Entre deux élèves, nos conversations se font de plus en plus personnelles. J’apprends qu’elle vit à quelques minutes à peine du collège, qu’elle a deux frères, qu’elle ne mange pas de viande, et qu’elle a fait Lettres Classiques, mais sans conviction.
De mon côté, j’essaie de contenir mes confessions. A dix heures, nous décidons d’un commun accord que l’heure du break a sonné. Dans le couloir, le nombre d’élèves a considérablement diminué. Nous nous excusons auprès d’eux pour cette attente supplémentaire. Ils nous pardonnent de bon cœur, surtout quand je leur affirme qu’on sera encore plus indulgentes après une bonne dose de caféine. L’un d’entre eux me propose même sa monnaie, pour s’assurer notre bienveillance…
Ma modeste conscience professionnelle s’apprête à refuser poliment mais Valérie s’exclame : « Ah non, cette fois, c’est moi qui t’invite, et j’y tiens » ! Le sourire qu’elle me lance alors me coupe le souffle. Aurais-je loupé un épisode ? Si je n’étais pas faible et en manque de caféine, j’aurais presque juré que c’était une avance. Impossible. Il s’agit de Valérie. Et puis même s’il s’agissait de plus, elle ne m’intéresse pas, non ? Ce n’est pas un petit tatouage qui va tout changer quand même ?!
Quand nous arrivons devant la machine à café, la salle des profs est déserte. Curieusement, cela m’inquièterait presque… Elle met une pièce dans la fente et me laisse choisir : café, long, sucré. Je la vois noter mentalement ma sélection de la même façon que j’avais relevé plus tôt qu’elle prendrait un cappuccino sans sucre.
Une fois nos breuvages dans nos verres, nous nous installons sur des fauteuils l’une en face de l’autre. Pour une fois, je ne sais pas quoi dire, alors je me tais. J’essaie de ne pas trop la regarder. Je me sens ridiculement timide et dramatiquement attirée… pour une raison qui m’échappe totalement.
Je sens son regard qui me scrute. Je sais qu’elle va parler, et curieusement, je ressens le besoin inexplicable d’entendre sa voix à nouveau, sa voix pour moi.
– Je voulais te dire… J’ai vu que tes élèves semblaient être particulièrement attachés à toi. Et on voit à quel point tu les aimes. C’est mignon, me dit-elle.
– Euh… merci ! Je n’irai pas jusqu’à dire que je les aime mais…
Elle sourit à nouveau et je détourne légèrement mon regard en ajoutant :
– Je peux te retourner le compliment. Tu es vraiment très douce avec eux. Ça les rassure un max, surtout un jour comme aujourd’hui. Je ne sais pas comment tu vas à être aussi… douce.
Pitié… Faites qu’elle ne me voit pas déglutir comme un vieux siphon engorgé…
– Merci, me répond-elle. C’est le genre de remarque qui me… touche
Si je n’étais pas trop occupée à cacher mon trouble, je remarquerais peut-être qu’elle rougit légèrement, mais sûrement. Elle poursuit néanmoins :
– Je suis contre la violence. Et je trouve qu’elle est déjà partout autour d’eux, en eux… Je ne veux pas en rajouter.
Je sais que ses propos sont sérieux et que je suis censée répondre quelque chose dans la même veine, mais une petite phrase musicale me revient, obsédante : « Tu t’entêtes à te foutre de tout mais pourvu qu’elle soit douce »… C’est le drame, il faut que je me reprenne.
– Et ça fait longtemps que tu enseignes ?
A défaut de dire quelque chose d’intelligent, il me faut au moins essayer d’en savoir plus sur elle…
– Quelques années oui, j’avais besoin de trouver une occupation, et accessoirement des revenus, supplémentaires. Un métier de jour qui me maintienne socialement.
Un métier de jour ? Mais que diable fait-elle de ses nuits ? Quel étrange personnage que voilà… Comme je lève un sourcil interrogateur, elle poursuit :
– Oui, j’ai besoin… de m’occuper tout le temps. Je suis insomniaque. Depuis une quinzaine d’années je sais comment meubler mes nuits : j’écris. Mais les journées me paraissaient vides de sens avant de m’orienter vers l’enseignement. J’ai longtemps hésité car je ne pensais pas avoir la carrure pour ça, et puis finalement, tout se passe très bien.
– Tu écris ?
Je suis soufflée. Un tatouage et une occupation nocturne intéressante et la voilà en quelques minutes propulsée au premier rang de mes ambitions.
– Tu écris quoi si ce n’est pas trop indiscret ? Tu as déjà été publiée ?
– Je…
Elle hésite quelques secondes, puis me détaille de la tête aux pieds, semblant approuver quelque chose.
– Bon, je suppose qu’à toi je peux le dire… J’écris principalement des… romans. Des histoires sentimentales sans grand intérêt, mais… orientées. Pour un certain… public, exclusivement.
– Ah bon ?
Devant le rouge qui lui monte aux joues, je me demande si je dois insister mais ma curiosité l’emporte.
– Quel genre de public ?
– Un public de femmes. Qui aiment les femmes.
Ben ça alors ! Bigre de bigre ! Alors elle en est ?! Mais… mais… mon radar est en panne ? Comment est-ce que j’ai pu passer à côté aussi longtemps ? Pourquoi ?! Devant mon ébahissement, elle se méprend :
– J’espère que ça ne te choque pas ? Me serais-je trompée à ton sujet ?
– Non, non ! Pas du tout. C’est juste que je… enfin je veux dire d’habitude je suis plus intuitive que ça !
– Oui, c’est mon drame personnel… Je passe toujours sous le radar… me dit-elle de son petit air triste.
– Ben ça alors, c’est trop fort ! Et tu as été publiée ? Peut-être que je t’ai déjà lue…
– On devrait y retourner, non ? me demande-t-elle gênée.
On le devrait, mais je ne veux pas. Je veux en savoir plus ! Je lui fais mon petit air de chat implorant, comme le chat Potté dans Shrek, mais si cela la fait sourire, elle n’en demeure pas moins muette.
Elle se lève et jette son gobelet vide dans la poubelle, attendant que j’en fasse autant. Dans ma tête, je fais circuler tous les noms des auteurs qui siègent sur mon étagère privilégiée, cherchant un éventuel pseudo qui lui correspondrait, mais je ne me risque à aucune supposition. Sur le chemin du retour à la salle, je continue de l’implorer, sans succès.
Chapitre quatre : L’invitation
Déjà une nouvelle élève prépare son passage. Je profite du sérieux ambiant pour détailler sous ce nouveau jour ma collègue. Si ses traits n’avaient rien de folichon il y a quelques heures à peine, je la regarde soudain sous un nouvel éclairage.
Sa déroutante fragilité est maintenant contredite par une sorte de puissance hors norme. Cette femme mène deux vies de front avec une pudeur et une douceur impressionnantes. Mais si je suis admirative devant cette force, la tristesse qui émane d’elle me fait dire que je suis encore loin de connaître tout ce qu’il y a à savoir à son sujet.
Une mèche s’est échappée de sa pince, et je la vois qui joue avec, entortillant négligemment son doigt autour. Quand elle lève les yeux sur moi, je fais semblant de me concentrer brusquement sur mes grilles d’évaluation. Je sens son regard sur moi et je sais que je pique un fard.
Les oraux reprennent et pendant plus d’une heure encore, les élèves défilent. Pour chacun, elle se montre attentionnée et bienveillante. J’essaie d’être à la hauteur de sa bonté naturelle. Quand le dernier quitte enfin la salle, nous discutons des notes et de leurs interventions pendant quelques minutes puis nous bouclons les grilles d’évaluations et remettons les tables en place.
Ce faisant, je reviens à la charge.
– Alors ? Je suis presque sûre que tu as été publiée… S’il te plait, dis-moi…
– Si… si je te le dis, tu acceptes de venir déjeuner avec moi ?
Je m’attendais à tout sauf à ça. Elle ne me donne pas l’impression d’être du genre à faire le premier pas… Aussi, devant son embarras, je m’empresse de répondre, sachant qu’il ne s’agit probablement que d’une invitation courtoise et désintéressée.
– Bien sûr !
– Alors je te le dirai tout à l’heure. Chez moi ça te va, ou tu préfères un restaurant ?
– Chez toi c’est parfait, dis-je. Je peux amener quelque chose? Il est tôt, j’ai le temps d’aller faire deux courses si tu veux…
– Non, non, ce ne sera pas nécessaire. Tu n’auras qu’à me ramener en voiture, j’habite vraiment juste à côté, je viens à pieds.
Je valide sans trop savoir quoi penser. Je décide de ne pas m’emballer et d’essayer d’être aussi détachée que possible, car après tout, il faut bien que je m’adapte au personnage… Je la sens quelque peu tendue, aussi, je tente de jouer la carte de la camaraderie. Le temps de ramener les notes à la principale adjointe et de gagner le parking, je plaisante et chambre quelques collègues qui passent par là. Elle me suit discrètement.
Quand nous nous retrouvons dans l’habitacle étroit de mon modeste véhicule, elle me dit :
– Tu es quelqu’un de très ouvert. Je t’envie. On voit tout de suite que tu es à l’aise avec tout le monde, et tout le monde t’apprécie.
– Bof, tu sais, comme beaucoup, ce n’est qu’une façade. Et puis je ne suis pas vraiment à l’aise, j’ai appris à faire semblant. Avec certains, ça marche mieux qu’avec d’autres. Parfois c’est payant, et on établit de vrais rapports, mais souvent, ça reste superficiel. Ma superficialité n’est pas enviable, elle est juste pratique. Où va-t-on ?
– Tu prends à gauche en sortant, j’habite la troisième maison sur la droite après le deuxième dos-d’âne.
– Ah… effectivement, c’est juste à côté !
Chapitre cinq : L’apéritif
Nous arrivons une minute et demi plus tard devant un petit portail qui s’ouvre sur un jardin sobre mais coquet. En passant le pas de la porte, je découvre encore une fois un univers qui me surprend.
Je m’attendais à quelque chose de froid et impeccable. Chaque chose à l’air bien à sa place, mais un plaid trône en boule sur le canapé. Sur une table basse, un mug et la théière qui l’accompagne n’ont pas été débarrassés. Elle s’excuse pour ces traces de vie courante qu’elle s’empresse de masquer. Je profite de ses occupations domestiques pour observer son chez elle.
Les murs sont d’un beige chaud. La plupart des meubles sont en bois brut, des meubles qui embaument la pièce principale, fraîchement cirés. Un peu partout, des étagères de livres, ce qui me rappelle vaguement mon propre appartement. Le salon/salle à manger dégage une réelle impression de confort. On a tout de suite envie de se vautrer dans le canapé et… Je m’égare. La cuisine est ouverte, à l’américaine. Elle est relativement petite mais très bien organisée.
Je remarque un couloir qui mène à quatre portes. Comme elle m’invite à me mettre à l’aise, je m’assois sur le canapé. La lumière rentre à grands flots dans la pièce et j’ai chaud. Quand Valérie me rejoint, elle s’est débarrassée de ses chaussures et de son sac. Elle ouvre en grand les deux baies vitrées et m’invite à m’installer sur la terrasse, pour profiter du soleil.
– J’ai de quoi faire une grosse salade composée, ça t’ira ? On peut prendre l’apéro avant si tu veux.
– Ça m’ira très bien. Et super d’accord pour l’apéro !
– Qu’est-ce que tu bois ? Je n’ai pas beaucoup d’alcools, s’excuse-t-elle…
– Oh, un jus de fruit, je préfère, je ne bois pas d’alcool.
Elle me fait un grand sourire rassuré et elle plonge son regard dans le mien. L’échange ne dure qu’une seconde, mais je sens quelque chose qui se fissure à l’intérieur de moi. Elle balbutie quelque chose d’incompréhensible et se dirige de nouveau à l’intérieur. Je la suis.
– Je peux t’aider à faire quelque chose ?
– Non, c’est gentil, je vais sortir quelque chose à grignoter et j’ai du jus de pomme, à moins que tu ne préfères raisin ou orange ?
– Pomme c’est parfait. Donne-moi les verres, je vais nous servir.
Elle me tend deux verres qui s’entrechoquent entre ses doigts. Le son cristallin provoque un petit frisson le long de ma colonne vertébrale, à moins que ce ne soit le contact fugace de sa main lorsque je me saisis de la bouteille qu’elle me tend…
En m’éloignant de la cuisine, je me retourne et la vois ouvrir ses placards, en sortir un paquet d’amandes grillées et un ramequin. Elle a l’air concentré, comme quand elle prenait des notes tout à l’heure. J’apprécie de la voir ainsi.
Les rayons du soleil m’accueillent à nouveau sur la terrasse, et comme je nous sers deux verres bien pleins, je m’efforce de réprimer ma sensation du moment… une sorte de nœud qui se créerait quelque part à proximité de mon estomac…
Quelques secondes plus tard, elle apparaît dans la lumière, les mains chargées de victuailles. Sa présence est désormais pleinement réconfortante. Certes, j’ai la curieuse impression de marcher sur des braises, pourtant, sa compagnie m’apaise.
Pendant l’apéritif, nous revenons principalement sur notre matinée. Le déroulement des épreuves, l’indélicatesse de certains de nos collègues, le manque d’organisation de notre administration, les perles entendues…
Une heure s’écoule, qui nous voit converser cordialement sur cette profession qui nous tient tant à cœur. Durant ce laps de temps, j’oublie presque mes appétits – nutritionnels et… sensuels – et j’apprécie de me retrouver face à quelqu’un qui partage ma vision de l’enseignement.
Pourtant, je suis aussi fougueuse et passionnée qu’elle est modérée et pudique. Elle s’en étonne, me dit que je ne connais pas ma chance.
– Tu as l’air si sûre de toi. Comme si tout était normal, simple, naturel…
– Mais je suis impulsive et je gaffe souvent tu sais… c’est le revers de la médaille !
– Mais tu sais ce que tu veux, et je suis sûre que la plupart du temps, tu dois l’obtenir…
A son sourire, je devine que le sujet pourrait facilement dériver… Est-ce l’impression que je donne ? D’être une lesbienne libérée qui branche tout ce qui bouge ? Ça c’est un comble ! Moi qui n’ai jamais été capable d’aborder directement qui que ce soit ! Mais puisqu’elle me tend une perche… j’en profite pour lui demander ce qu’elle a tant de mal à obtenir.
– Tu sais, j’ai choisi un mode de vie assez particulier, me répond-elle évasivement.
– Tu peux développer ?
– Tu sais déjà à quel point c’est prenant d’être prof, et la nuit, j’écris en moyenne cinq à six heures. Je produis deux romans par an en moyenne. Je lis beaucoup aussi, et j’écris d’autres petites choses à droite, à gauche, je ne supporte pas de ne rien faire. Il n’y a pas vraiment de place pour le hasard dans ma vie, l’inconnu me fait peur.
– Tu veux dire que tu as peur de l’inconnu-E ?
– C’est un peu ça.
– Attends, tu veux dire que tu racontes tout plein d’histoires sentimentales dans tes romans mais que tu n’en vis pas ? Jamais ?
– Ça m’est arrivé. Autrefois. Mais pas depuis un bail.
– Mais pourquoi ?!
La véhémence de mon étonnement la fait sursauter. Je la sens reculer et déjà je regrette mon emportement.
– C’est compliqué. Tout est compliqué pour moi. Le simple fait d’inviter quelqu’un chez moi est compliqué.
– Ah ? Je suis flattée alors.
– Tu peux, me dit-elle en rougissant et se raclant la gorge. C’est assez simple de discuter avec toi. Et tu me fais rire…
– Je ne sais pas comment je dois prendre ça, mais on va dire que c’est un compliment. Et sinon, je peux poser une question indiscrète ?
– Euh… oui, hésite-t-elle.
– Tu ne dors jamais ?
– Je dors peu, lâche-t-elle dans un soupir de soulagement.
Manifestement, elle s’attendait à quelque chose de plus indiscret…
– Une ou deux heures me suffisent.
– Mais… mais comment tu fais ? Comment tu survis ?
– Comme toi, un jour après l’autre, rétorque-t-elle en souriant franchement.
– Et tu n’as… personne dans ta vie ? Ni homme, ni femme, ni enfant ?
– Même pas un chat, j’y suis allergique ! Oui, je sais, c’est tragique pour une lesbienne.
– Alors tu es lesbienne, exclusivement ?
– Oui, pourquoi, toi non ?
– Si.
Chapitre six : Les amuses-bouches
Un curieux silence s’installe. Le nœud de mon estomac est devenu aussi envahissant que si j’attendais des triplés. A nouveau, elle m’a l’air si fragile. Peut-être espère-t-elle de moi quelque chose de précis… autre qu’une banale conversation… Parfois, j’ai l’impression qu’elle attend que je prenne les devants, mais presque aussitôt je suis amenée à revoir mon hypothèse.
Elle est si seule. Et je ne comprends pas sa solitude car elle semble avoir tant à donner. La distance qu’elle peut mettre entre elle et le monde la plupart du temps disparaît dès lors qu’elle vous accepte et vous parle. Comme un de ses élèves, je me sens confiante et apprivoisée. Pourtant, je n’ose envisager d’aller plus loin, craignant de provoquer un repli radical.
Elle me regarde calmement, et moi je bous à l’intérieur.
– Valérie ?
– Oui.
Je ne sais pas quoi dire. Mais je ne peux laisser s’instaurer le silence entre nous. Il devient insupportable. Surtout qu’il me pousse à guetter les mots qui sortiraient de sa bouche… et donc à regarder ses lèvres…
– Non, rien…
– Quoi ? Tu as faim peut-être… Pardon, je n’ai plus l’habitude de…
Comme elle se lève précipitamment, bousculant la table dans sa confusion, je saisis son bras pour la retenir.
– Non, ne t’inquiète pas, je n’ai pas vraiment faim. Pas tout de suite.
Son bras me semble tout fin, si délicat, rendu brûlant par le soleil qui dore sa peau en cette heure zénithale. Je me lève et lui fais face, les yeux plongés dans les siens.
– Alors tu veux… commence-t-elle.
– Toi, que veux-tu ?
Elle détourne son regard une seconde et le peu d’équilibre qu’il me reste flanche. Suis-je allée trop loin ? Trop vite ? Se peut-il que je me sois trompée ? J’ai toujours été si nulle dans ce domaine… Je ne suis pas à la hauteur dans le rôle de la séductrice. J’en suis incapable. A tout moment, je m’attends à ce qu’elle coure s’enfermer dans ses toilettes en me hurlant de quitter sa maison.
Comme je desserre l’étreinte de son bras et esquisse un pas en arrière, elle attrape ma main et vient maintenir le contact de nos peaux. J’ai l’impression d’avoir trois ans et d’être sur le point de découvrir le secret de la barbe à papa.
– C’est ridicule, me dit-elle soudain en souriant. Le cliché ultime. Deux lesbiennes qui après quelques heures de discussion et quelques affinités envisagent de passer à l’étape suivante ! J’aurais pu écrire un truc là-dessus…
– Les besoins du corps, hein ?
– Rien de répréhensible, au fond. Qu’une banalité attendue…
Si sa réaction pourrait me blesser, il n’en est rien. Je ris aussi. Sommes-nous si prévisibles ? Sa main serre la mienne, comme pour sceller un pacte tragicomique, mais elle ne la lâche pas pour autant. De longues secondes passent au ralenti. Notre rire se mue en sourire jusqu’à ce qu’un air grave envahisse à nouveau nos visages. Imperceptiblement, nos corps se rapprochent et mes doigts viennent croiser les siens.
Incapable de réprimer mes mots, je lance :
– Peu importent les clichés. Dis-moi ce que tu attends de moi. Je ne sais pas si…
– Chut, fait-elle gentiment.
Si je ne la sentais pas trembler, je pourrais penser être la seule à être bouleversée à cette minute.
– Viens, me murmure-t-elle à l’oreille. Je veux te montrer quelque chose.
Quand nous pénétrons dans le salon, le contraste de luminosité nous fait plisser les yeux. Tout paraît si sombre tout à coup ! Mais sa main oriente mes pas. Elle nous dirige vers le couloir. Mes jambes sont en coton. Malgré moi, mon esprit se perd en anticipation euphorisante. Déjà j’imagine le coton délicat de ses draps… N’importe quoi ! Comme si elle m’emmenait dans sa chambre ! Non mais ça ne va pas la tête ?! On se calme là-dedans ! Elle veut sûrement me montrer sa collection de timbres !
Quand je pense qu’elle envie mon audace, elle serait certainement morte de rire de voir à quel point je n’en mène pas large à cet instant… Quand elle s’arrête devant une porte à notre gauche, mon esprit se vide totalement. Avant de tourner la poignée, elle me dit sur le ton de la confidence : « C’est ici que je passe le plus clair de mes nuits ».
Chapitre sept : Les entrées
Quand nous franchissons le pas de la porte, je devine que nous n’en sortirons pas de sitôt. C’est là. Son univers. Son monde. Son cœur. Cette pièce l’incarne dans toute sa force et sa fragilité. Officiellement, il s’agit de son bureau, mais c’est bien plus que cela. Trois des quatre murs sont envahis d’étagères chargées de livres. Une bibliothèque impressionnante d’une richesse et d’un hétéroclisme qui forcent mon admiration. A droite et à gauche, deux sofas encadrent un poêle central qui doit conférer à la pièce une douce chaleur en hiver. Je remarque que si le sofa de droite semble neuf, celui de gauche accuse les ans. Pourtant les modèles paraissent identiques. Contre le mur du fond, un étroit bureau en chêne massif supporte un ordinateur portable et quelques classeurs. Au-dessus du bureau, un immense dessin, magnifique, à la sanguine, représente deux femmes enlacées dans une position évocatrice : l’une visiblement au bord de l’extase et l’autre arborant une expression de concentration extrême. Leurs traits sont d’une tendresse infinie et un drapé léger vient rehausser la fluidité du mouvement suggéré.
L’atmosphère de la pièce est extraordinairement calme mais la vue du dessin suffit à embraser mes sens déjà bien émoustillés. Pourtant, je maîtrise mes émotions, consciente de la solennité du moment.
– C’est ici que j’écris, me dit Valérie d’une petite voix timide.
– C’est une pièce magnifique. Tout le monde doit te l’envier…
– Personne ne la voit. Jamais.
Je ne suis pas surprise, mais une peine profonde m’inonde alors. J’ai envie de la prendre dans mes bras, de la serrer suffisamment fort pour chasser cette solitude dans laquelle elle semble s’être murée. Son regard erre sur les étagères et revient sur moi régulièrement. J’avance, incertaine, et promène mes yeux sur les rayons soigneusement rangés de la bibliothèque. Je me dis que, quelque part au milieu de ces œuvres se trouvent sans doute les siennes. Mais étrangement, cela n’a plus grand intérêt tout à coup.
Sa main vient se poser sur mon épaule. Je la sens, juste là, derrière moi. Je m’efforce de ne pas me retourner.
– Alors, tu as trouvé mon nom de plume ?
– Euh… non. Je ne suis pas sûre de vouloir savoir finalement.
– Ah… je comprends, tu as peur d’être déçue.
– Non, c’est que…
Je me retourne et sa main glisse le long de mon bras. La tension est insoutenable. Elle est là, juste devant moi, incertaine, fascinante, vibrante. Je ne résiste pas à la tentation de passer un bras autour de sa taille, si fine. Ma main vient se poser sur la chute de ses reins et mes lèvres recueillent les siennes, chastement, délicatement. Je ne peux m’empêcher de relever qu’elle sent terriblement bon et que ses lèvres sont d’une douceur exquise.
Elle ouvre de grands yeux étonnés et comme je me recule, prête à m’excuser, ses mains viennent saisir mes épaules et elle me rend mon baiser avec toute la délicatesse du monde. Quand finalement nous nous éloignons, je reprends :
– Excuse-moi mais tu vois, rien de ce que tu as pu écrire ne m’intéresse plus que ça. Et pourtant, j’aime lire !
– Je vois.
Elle semble aussi confuse que moi, et pourtant, je sens son désir faire écho au mien. Je brûle de la prendre mes bras et l’entraîner vers des tourbillons de plaisir à même le parquet, ou là, contre ces étagères, mais mon tragique sang froid reprend le dessus. Comme toujours.
– Alors, comment ça se passe ? poursuit-elle.
– Pardon ?
Devant mon air interrogateur, elle s’explique :
– Dans ces clichés, dans la vraie vie, comment ça se passe ? Je t’emmène dans ma chambre ? C’est ça la prochaine étape, non ?
MAYDAY ! MAYDAY ! Code ROUGE ! Houston, on a un problème ! Là, je vais exploser, c’est sûr… Pendant une seconde, je me demande si sa candeur n’est pas feinte. Si tout cela n’était pas une ruse rondement menée pour me conduire juste ici. Aux portes de l’enfer… ou du paradis.
Mon regard fiévreux balaie la pièce à la recherche d’une caméra cachée. A tout instant, je me prépare à voir débarquer mes meilleurs potes, ravis de m’avoir fait cette cruelle blague… mais il n’en est rien. Elle attend sérieusement que je lui réponde. Elle a pris mes mains et les a portées à ses lèvres.
Cette fois, impossible de résister. Je saisis son visage entre mes mains et l’embrasse avec ferveur. Quand nos langues se rencontrent, nos corps réagissent dans un même sursaut et viennent se percuter voluptueusement.
Mes mains s’aventurent dans son dos alors qu’elle vient saisir ma taille. D’un mouvement impatient, elle vient coller son bassin contre le mien ce geste provoque une décharge d’une telle intensité dans mon bas-ventre que j’en ai le souffle coupé.
Elle-même recule sous la violence du choc mais avant qu’elle ne s’excuse comme elle est sur le point de le faire, je renouvelle l’expérience, emprisonnant sa bouche de mes lèvres avides. Dès lors qu’ils sont soudés, nos bassins lancent des salves de désirs et de plaisir mi-réalisé, mi en suspens.
Mes jambes flageolent mais Val resserre son étreinte. Derrière moi, je sens la présence rassurante des étagères et pour plus de sécurité, je fais un pas en arrière, jusqu’à me sentir pleinement soutenue.
Il y a une seconde à peine, j’avais l’impression de maîtriser la situation, mais là, tout m’échappe. Seul compte le contact de son corps contre le mien, de sa peau qui vient se frotter à la mienne. Ses lèvres viennent parcourir ma gorge et chaque poil de mon corps se dresse. Mes mains cherchent à se glisser sous son T-shirt et quand je rencontre ses tétons, je me sens défaillir.
– Bon sang ! Je ne vais jamais tenir…
– Je te tiendrai, me dit-elle de sa voix la plus rassurante, bien qu’entrecoupée par un souffle irrégulier. Je te tiens.
Ce disant, elle fait glisser ma fermeture éclair et déboutonne mon jean qui tombe maladroitement à mes pieds. Je veux la déshabiller moi aussi, mais mes mains tremblent dangereusement. Je tire sur son haut pour le lui retirer mais je sens sa main se frayer un chemin dans ma culotte. Je ne peux retenir un petit cri.
Et les préliminaires alors ? Femme des cavernes ! Oh et puis zut… on vient de passer cinq heures de préliminaires. Je veux ses doigts en moi, là, maintenant tout de suite !
Comme si elle lisait dans mes pensées, elle écarte légèrement mes jambes de ses genoux adroits et vient se coincer contre moi, soutenant mon corps pantelant, pendant que ses doigts rencontrent mon clitoris et constatent que l’humidité ambiante est largement suffisante pour explorer d’autres mystères. En me pénétrant, elle m’embrasse. L’explosion de plaisir est immédiate.
Doucement ! ai-je envie de crier… je vais jouir en trois secondes, c’est ridicule. Mais la dame se moque de ma détresse. De sa main libre elle vient recueillir un sein au travers de ma chemise et de mon soutien-gorge pendant qu’entre mes jambes, son corps entame le même mouvement de va-et-vient que ses doigts. A ce rythme-là, il me faut moins d’une minute pour exulter. Mon orgasme est violent et s’éternise, prolongé par les caresses profondes et persistantes de ma partenaire.
A quoi aurais-je dû m’attendre ? Il y a quelques jours, quelques heures, je n’aurais même pas espéré une mièvre étreinte avec elle. Là, j’en reste pantoise. Qu’est-ce que c’était que ça ? Je croyais qu’elle ne voyait personne ? Et depuis longtemps… Dans ce cas, comment… ? Impensable.
Pendant que je reprends mes esprits, Val embrasse par petites touches mes joues, mes lèvres, mon cou. Je suis surprise de lire dans ses yeux une forme de timidité totalement incongrue.
– C’était… bon ? me demande-t-elle, hésitante.
J’explose de rire en la prenant dans mes bras.
– Oh que oui ! D’ailleurs je suis désolée…
– De quoi ?
– D’avoir tenu trente malheureuses secondes !
Mon sourire fait disparaître ses craintes, mais bien vite je n’ai plus envie de plaisanter. Si mon corps est provisoirement apaisé, ma soif d’elle ne l’est pas, et je la sens frissonner contre moi. J’enlève rapidement ma chemise et mes sous-vêtements puis m’applique à la dévêtir à son tour.
– Tu n’es pas obligée, me dit-elle d’un air entendu alors que je la libère enfin de son T-shirt.
– Obligée de quoi ?
– De me faire… quoi que ce soit.
– Tu veux rire ?
Je ne suis pas sûre de comprendre. Envisage-t-elle le sexe à sens unique ? Je sais que certaines le préfèrent ainsi… mais pas moi. Ou pire, croit-elle que je puisse ne pas la désirer ? Après ce qui vient de se passer ? S’imagine-t-elle que je ne la toucherais que par pitié ?
– Val, j’en ai terriblement envie, et tu es… si désirable que…
Elle ne me laisse pas finir mon plaidoyer. Ses lèvres me donnent l’absolution. C’est elle qui finit de se dénuder pendant ce baiser et nos peaux s’atteignent enfin, pleinement. A son tour, elle cherche le soutien de la bibliothèque derrière elle.
Je sens ses petits seins contre ma poitrine pointer ostensiblement. Je délaisse sa bouche pour en saisir un téton de mes lèvres. Mon geste lui arrache un gémissement. Son corps entier réagit de manière fulgurante. Elle se soulève contre moi et vient, de ses mains, saisir ma tête.
Je devine son désir et le sens se répandre sur ma cuisse. Je dois résister à l’envie d’être aussi directe qu’elle. Si mes doigts brûlent d’explorer son sexe, je les contrains à rester sur ses seins. Mes lèvres, elles, poursuivent leur chemin. Quand j’arrive à son nombril, je relève la tête et cherche son regard. Il est sans équivoque.
Alors que mes mains quittent ses seins pour venir empoigner ses fesses, je m’agenouille devant elle et passe mes épaules entre ses cuisses. Déjà, sa fragrance m’enivre et je savoure mon plaisir à venir. J’observe avec gourmandise les contours de ses lèvres luisantes, en soufflant légèrement dessus. Sa vulve me fait face, pleine, écarlate.
J’avance délicatement ma bouche vers elle pour lui présenter mes respects. A ce premier contact direct, Val pousse un gémissement encourageant. Elle est délicieusement salée. Ma langue l’explore alors, remontant son sexe sur toute sa longueur, puis la pénètre lentement. Nouveau gémissement.
Quand je reviens vers son clitoris, j’entreprends de le sucer patiemment. Mes lèvres l’enserrent soigneusement pendant que ma langue vient lui imprimer de petites pressions. C’est alors que les mains de Val retrouvent le chemin de ma tête et se glissent dans mes cheveux pour imprimer leur propre rythme.
J’aime qu’elle prenne les commandes de cette façon. Au fur et à mesure, le rythme s’accélère et les gémissements s’accentuent. Sur le point de jouir, je sens ses mains presser de plus en plus fort contre ma tête, à tel point que j’ai peur de lui faire mal. Mais je m’exécute et son plaisir, quand il explose dans ma bouche, m’excite tellement que je suis au bord de l’orgasme à nouveau. Les spasmes qui la parcourent trahissent l’intensité de sa jouissance.
Pendant un instant, je suis rassurée. J’ai toujours peur de ne pas être à la hauteur, et je sais qu’il peut arriver de tomber sur… disons des incompatibilités. Mais là, cela ne semble pas être le cas.
Comme j’allais me relever pour la prendre dans mes bras, elle tombe à genoux à côté de moi et m’étreint chaleureusement.
– Merci, me dit-elle.
– Euh… non mais… enfin… ce fut un plaisir !
– Je veux dire merci parce que ça fait tellement longtemps que je n’ai pas… qu’on ne m’a pas… enfin tu vois ?
– Je crois, oui… Mais rassure-toi, ça ne se voit pas !
L’instant a beau être touchant, il n’en demeure pas moins douloureux. Val s’en rend vite compte et m’aide à me relever.
– Finalement, on n’est pas si cliché que ça… on a évité le lit ! dis-je fièrement.
– Oui, mais à quel prix ? Regarde dans quel état sont tes genoux !
– Boh, ça, ce n’est pas grave… ça en valait la peine.
– On aurait au moins pu opter pour un des sofas…
– Pas le temps.
Je me tiens là, devant elle, entièrement nue, et me sentirais presque vulnérable si elle ne l’était pas plus encore que moi. Je ne peux m’empêcher de la toucher. Mes mains continuent de la caresser gentiment et je sais bien que mon désir d’elle est loin d’être assouvi. Et ce désir semble manifeste et réciproque puisqu’elle reprend :
– Je crois que, pour le bien de tes genoux… et par simple bon sens, il serait préférable que je te fasse visiter ma chambre.
– D’accord.
Si je sens encore sa pudeur transparaître dans son regard ou ses intonations, son corps, lui, ne ment pas et tient un langage sans appel. J’enlace sa taille et avance derrière elle jusqu’à la porte d’en face.
Sa chambre est petite. Il n’y a qu’un lit qui semble ne jamais avoir été foulé. Je la soupçonne de passer ses rares et précieuses heures de sommeil sur le canapé du salon où traînait le plaid à notre arrivée.
Chapitre huit : Le plat de résistance
Elle contourne le lit sur la gauche et se penche pour en défaire les draps. Elle l’ouvre et s’y glisse en prenant soin de bien remonter les oreillers. Je l’observe avidement et pose à mon tour un genou sur le matelas moelleux. Là, devant moi, elle s’expose dans toute la splendeur de sa nudité, repoussant ses prudes barrières jusqu’à écarter légèrement ses cuisses pour mieux m’accueillir, les yeux pleins de promesses étourdissantes…
Si je n’étais pas encore affamée, j’aurais sans doute apprécié de prendre le temps de l’observer. J’aurais pu m’étonner de la trouver si appétissante à présent alors qu’elle m’avait semblé si insignifiante jusque là. J’aurais pu me délecter du spectacle de son corps ainsi dédié à mes soins, de ses petits seins si délicieusement fiers et durcis par l’excitation, de la douceur de sa peau encore moirée de nos premiers ébats, de la force et de la vigueur de ce corps pourtant si fragile en apparence.
J’aurais pu…mais déjà mes doigts atteignent son pied, ma main court sur sa jambe et revient s’enrouler autour de sa cheville. Mon pouce trace distraitement les contours de son tatouage pendant que mes lèvres s’approchent du motif tribal. Comme je l’embrasse, Val frissonne de plus belle et d’une main tendue, m’invite à la rejoindre tout contre elle. Je m’exécute en laissant ma bouche remonter sa jambe, mordiller sa hanche, lécher son ventre et venir se poser sur son sein. Ses bras capturent mes épaules et son étreinte achève de réduire à néant mes ultimes distances.
Elle est là. Avec moi, pour moi. Elle. Moi. A cet instant, rien d’autre ne compte que cette vérité et notre désir l’une de l’autre. Il sera temps, plus tard, de poser des questions, connaître, prévoir. Là, je veux vivre dans l’intensité du moment. Quoi de plus grisant que de la sentir onduler sous moi ?
D’un mouvement quasi chorégraphié, nos cuisses s’entrecroisent et nos corps s’agitent au rythme de nos bouches. Son souffle est chaud et saccadé, enivrant. Les yeux fermés, elle répond dans une sorte de transe charnelle aux assauts de mon corps et déjà le plaisir irradie entre mes jambes. La chaleur du frottement entre nos sexes et nos cuisses devient insoutenable.
Je sens ses mains parcourir mon dos et venir presser mes fesses contre elle, marquant un tempo de plus en plus effréné. Mes gémissements se mêlent aux siens et se hissent crescendo vers des aigus insoupçonnés.
L’équilibre est là, dans cet enchevêtrement des corps dévoués à la quête du plaisir, ce plaisir égoïste et individuel qui cette fois, et sans préméditation, devient mutuel. Est-ce son orgasme qui provoque le mien ? Est-ce l’inverse ? Peu importe au final. Toujours est-il que je suis impressionnée. Je ne pensais pas pouvoir jouir de cette manière et quand les vagues de volupté déferlent en moi, je jubile de sentir Val secouée de ce plaisir simultané.
Quand les spasmes s’atténuent, mon corps se relâche et je viens peser de tout mon poids sur mon amante. Je voudrais déchiffrer l’expression de son visage mais je n’ai pas le courage de relever la tête. Là, tout contre elle, je suis merveilleusement bien. Sa poitrine et la mienne se gonflent au rythme de nos respirations encore irrégulières et nos cœurs cherchent à retrouver une cadence plus sereine. Ils martèlent si fort nos cages thoraciques que je ne distingue pas le sien du mien.
J’enroule mes bras autour de ses épaules et pousse un profond soupir d’aise. Ce à quoi Valérie répond en posant sa bouche contre mon front et en caressant l’arrière de mon crâne, puis mes omoplates. J’aime ses caresses. J’aime la tendresse apaisée et apaisante de cet instant, le silence de nos lèvres, la rumeur décroissante de nos corps…
Je souris, béate de satisfaction, et je sens sur mon front un autre sourire se dessiner sur ses lèvres. Je ne résiste pas à l’envie de la regarder cette fois. Ses paupières, encore closes, se relèvent quand elle devine mon regard sur elle. L’expression de ses iris me bouleverse.
Son plaisir était indiscutable, pourtant son regard reflète à nouveau une forme de tristesse infinie. Je ne sais comment réagir. Je m’apprête à lui demander ce qui ne va pas et pour cela, je cherche à la délester de mon poids. Comme je glisse à son flanc, ma jambe coulisse contre son sexe encore copieusement humide. A ce geste, son corps tout entier se cambre et sa main vient saisir la mienne dans un réflexe convulsif.
En une fraction de seconde le désir s’éveille derechef. Son visage est transfiguré : ses yeux se sont refermés et ses dents pincent lascivement sa lèvre inférieure.
Hésitante, je lui demande :
– Encore ?
En guise de réponse, elle porte ma main à sa bouche et enfourne mon index et mon majeur. Une nouvelle fois, mon cœur fait des bonds dans ma poitrine et mon entrejambe s’enflamme. Son corps se met en mouvement et je la sens se retourner contre moi. Mes doigts toujours dans sa bouche, elle vient coller son dos contre ma poitrine et se love ainsi au creux de mes bras.
Alors que ma bouche vient caresser et mordiller sa nuque, elle déloge mes doigts et dirige ma main tout contre son sexe. Elle est divinement mouillée et mes doigts se fraient facilement un passage jusqu’à son clitoris. Nul besoin de l’exciter, celui-ci est d’ores et déjà turgescent. Pourtant, je le titille, je fais jouer mes doigts, tous mes doigts autour de lui.
Contre moi, Val s’agite. Cette fois, je veux prendre mon temps. Mes caresses se font lentes, régulières. Ma main entière vient presser sur son sexe. Parfois, quand je m’aventure de plus en plus bas, mon pouce vient frôler son clitoris et provoque une nouvelle secousse.
Sa respiration est de plus en plus prononcée et je devine maintenant qu’elle va vouloir jouir, vite. Mais je suis contre. Je veux la pénétrer, je veux la sentir jouir autour de mes doigts et la maintenir comme ça contre moi. Quand elle commence à gémir, au bord de l’orgasme, je ralentis cruellement, et cette fois, mes doigts se risquent en elle.
Mon incursion lui arrache un cri. L’étau de ses jambes se resserre instinctivement mais elle est tellement mouillée que rien ne peut empêcher ma main de poursuivre son va-et-vient. D’abord deux doigts, puis trois. Je m’étonne de la trouver si… dilatée. Mes gestes sont lents mais de plus en plus profonds.
Quand elle vient poser sa main contre la mienne pour accompagner mes mouvements, j’ose un quatrième doigt, devinant que c’est ce qu’elle attend. Je suis complètement étourdie de sentir ainsi ma main en elle, et plus encore de sentir, d’entendre, de toucher son désir croissant. De mon bras libre, je resserre notre étreinte, mêlant nos sueurs, plaquant nos peaux embrasées.
Mes fesses se contractent à chaque pénétration un peu plus contre elle et je sens mon sexe répandre ma propre humidité sur les rebonds incandescents de sa croupe. Ses petits cris étouffés m’affolent dangereusement et sans m’en rendre compte, je mords dans sa clavicule à pleine bouche. Elle jouit soudain, s’arquant de tout son long rugissant son plaisir dans un « OUI ! » éraillé et frénétique.
La fureur de son orgasme m’encourage à laisser ma main poursuivre son œuvre jusqu’à l’extinction des feux. D’une pression subtile elle me fait comprendre qu’elle en a assez et je cesse mes mouvements, mais sans me retirer : je la tiens tout contre moi. J’embrasse tendrement sa nuque, guettant une réaction de sa part et quand son corps finit par se relâcher, son soupir de satisfaction me comble.
Comme je vais déposer un baiser délicat sur son épaule, je découvre avec stupeur que j’ai laissé l’empreinte de mes dents sur elle. Confuse et inquiète de sa réaction, je m’excuse aussitôt.
– Ne t’excuse surtout pas, me répond-elle dans un sourire que je devine. C’était très… c’était parfait.
Elle se retourne vers moi et son visage est bel et bien lumineux. Je suis rassurée. Dans ses yeux, l’étincelle de désir scintille encore. Je la soupçonne cependant de ne rien attendre de ma part, cette fois.
Intuitivement, nos corps se sont de nouveau enlacés et déjà sa main caresse mes hanches, mes fesses, mes cuisses. Elle m’embrasse langoureusement et me fait basculer délicatement sur le dos. Je suis si… prête, que j’ai peur de jouir aussi rapidement que la première fois ! Rien qu’à l’idée de ses doigts ou de sa langue, je sens que je peux exploser.
– Val, je t’en prie, va doucement sinon je vais jouir tout de suite…
– Mais je n’ai même pas encore commencé, s’indigne-t-elle !
– Je suis faible…
– Oh que non ! Tu es tout sauf faible… à moins que… Oh, tu as faim peut-être ? C’est parce qu’on n’a pas…
Comprenant qu’elle culpabilise de m’avoir privée du déjeuner promis, je l’interromps tout de suite.
– Non, je t’assure, ma faiblesse n’a rien à voir avec la nourriture… Pourquoi, toi tu as faim ?
Je guette sa réponse, inquiète de devoir ronger mon frein le temps d’un repas… mais à mes mots, son regard se porte immédiatement entre mes jambes et l’expression qui envahit son visage ravive ma libido. Trois mots s’étranglent dans sa gorge tandis qu’elle pince à nouveau sensuellement sa lèvre inférieure : « Faim… de toi…»
La suite ici.
je ne pourrai plus regarder mes collègues comme avant
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Mieux vaut faire comme si on ne savait rien, @Jeandesantec ! Sinon, l’ambiance risque de devenir sulfureuse en salle des profs ! 😜
La réalité est souvent bien moins intéressante, de toute façon…
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