Poétique de l'assouvissement

Dans ma tête.

Il faut être honnête avec soi, et je sais très bien que tout est dans ma tête… mais pas seulement. Mon corps tout entier s’est plié à ce que mes yeux ne peuvent voir, ce que ma bouche ne peut goûter, ce qui manque à ma peau. C’est étourdissant, violemment intense, mordant le pouvoir du désir. Plus sournoises encore, les morsures de la mémoire.

Hier matin encore, j’ouvrais les yeux sur le souvenir saisissant de ta poitrine, fière, tendue, si insolemment comestible. Ce n’était qu’un flash, une seconde déchue qui aura suffi à ruiner l’innocence des premières heures du jour. Une seconde explosive, qui de sa déflagration muette aura soumis mon corps entier aux exigences de la chair.

Plus que cette vision fragmentée, constater ta nudité provocante, m’y arrêter comme on s’extasie devant une oeuvre d’art ou une aurore boréale, sentir le désir officier jusqu’à la plus infime fibre de mon corps : contractions bas-ventrales, palpitations, respiration aléatoire, frissons, chaleur glacée ou fraîcheur incandescente, larme (?), humidité certaine… rien n’est épargné.

Et même la foudroyante réalité de ton absence n’est pas parvenue à apaiser mon envie de toi.

Mais ce matin…

Ce matin tu es là.

Les brûlures de l’eros sont tout aussi saisissantes et déjà elles aiguillonnent savamment mes parcelles. Mon corps s’enfle, possédé par ce désir toujours croissant, intensément vivant, dont tu es le souffle. Il est décuplé par les nouveaux souvenirs qui sont venus nous compléter cette nuit, dans le consentement de nos plaisirs pour ce qu’ils sont : nécessité, grâce et extase. Nous nous sommes offertes sans autre attente que cette certitude de chair magnifiée, et comme toujours nous n’avons pas été déçues.

Comment pourrions-nous l’être ?

Nous sommes de l’ordre de l’accord et du désordre des corps… et quand je te vois là, si hédonistement abandonnée à Morphée, je le jalouse et ne peux empêcher ma main de venir caresser tes courbes. Quand je te touche, c’est moi qui frissonne. Ta peau est un hymne à la sensualité, un hymne dont je veux jouer encore et encore toutes les notes de la gamme, ainsi que les notes qui restent à inventer.

Si mes doigts te réveillent, je comprends par tes gémissements que tu ne leur en veux pas. Et quand tu ouvres enfin les yeux pour chercher mon regard, ce sont de nouvelles heures pleines de promesses qui éclosent dans le froissement lascif des draps et les cris à peine étouffés de nos peaux.

Être, encore une fois, plaisir. Avec toi.

« Le poème est l’amour réalisé du désir demeuré désir » René Char

16 commentaires

  1. On sait toutes que ta plume est toujours poétique et jamais vulgaire, même quand tu écris une nouvelle érotique. C’est toujours un délice de te lire que ce soit érotique ou non 🙂 Bref ne change rien 😉

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  2. Est-ce que l’on peut encore mieux exprimer ces choses-là ? Non. Non parce que tu réussis à traduire à la fois l’instinct brute et la poésie de la chose. Ca n’est pas Sale, c’est Beau. Mille bravos 🙂

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  3. « L’Eros aujourd’hui a déchiré mon âme,
    Vent qui dans la montagne s’abat sur les chênes.
    L’Eros a ployé mon âme, comme un vent
    Des montagnes tord et brise les grands chênes…
    Et je vois périr, dans le flambeau mouvant,
    L’essor des phalènes.  » [Sappho]

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